Les télécommunications analogiques et numériques
4. Les télécommunications analogiques et numériquesLe modem
Contenu de cette section
Le rôle du modem est d'adapter les signaux rectangulaires de
données, que le réseau téléphonique ne peut pas
transmettre tels quels, en signaux transmissibles par ce réseau.
Il a en fait deux fonctions~:
-
un rôle d'adaptation du signal aux lignes du réseau
utilisé, c'est-à-dire de modulation et de
démodulation~;
-
un rôle de dialogue avec l'équipement informatique auquel
il est relié.
Il tient donc exactement le même rôle fonctionnel qu'une couche
de communication (TCP, par exemple). Il possède une interface
permettant un dialogue avec un utilisateur se trouvant à un niveau
supérieur. Ici il s'agit d'une interface physique (y compris
électrique). Il communique avec une entité paire (un autre
modem) selon un protocole.
La structure interne d'un modem est décrite ci-dessous~:
Les paramètres caractérisant un modem sont~:
-
le débit d'information en bits/s~;
-
le mode de transmission~: synchrone ou asynchrone~;
-
le support de transmission utilisé~: réseau ou
ligne spécialisée~;
-
le mode de couplage à la ligne~: électrique ou
acoustique.
Nous aborderons assez rapidement l'ensemble de ces paramètres, selon
l'utilisation que nous aurons à en faire. La notion de débit
devrait maintenant être assimilée.
Penchons-nous rapidement sur les modes et les supports de transmission
utilisés. Voyons ensuite plus précisément le
rôle d'adaptation du signal du modem, puis le dialogue qui met en jeu
la jonction et la ligne.
Commençons par définir un vocabulaire commun.
4.1 Des bits et des débitsVocabulaire
Un avis est une recommandation édictée par l'U.I.T
(Union Internationale des Télécommunications), organisation
intergouvernementale compétente en télécommunications.
Les avis ont valeur de norme au sein de l'Europe, puisque les organismes de
Télécom nationaux ont encore le monopole. Les
recommandations sont issues de travaux de diverses commissions
d'études et sont adoptées lors des assemblées
pleinières (délai de l'ordre de neuf mois, étant
donné l'évolution rapide des technologies). La section
Etat actuel de la normalisation
décrit les
différents avis actuellement en vigueur.
Dans sa normalisation, l'U.I.T définit l'équipement
informatique comme un ETTD (Équipement Terminal de
Traitement de Données) et le modem comme un ETCD
(Équipement Terminal de Circuit de Données). La
connexion d'un équipement informatique à un modem, par
exemple, est réalisée par l'intermédiaire d'une
jonction ou interface.
On appelle half-duplex (bidirectionnel à l'alternat), une
transmission s'effectuant dans un seul sens à la fois. On appelle
full duplex (bidirectionnel simultané), une transmission pouvant
s'effectuer dans les deux sens en même temps. Ces transmissions
peuvent avoir lieu indifféremment sur liaison 2 ou 4 fils.
4.2 Le mode de transmission
Une transmission de donnée est toujours liée au facteur
temps. Dans les transmissions en série qui constituent la
majorité des transmissions, l'émetteur et le récepteur
doivent travailler à la même cadence. Dans le mode
synchrone, ils sont calés sur le même rythme grâce
à des signaux d'horloge émis avant la transmission. Dans le
mode asynchrone, l'horloge du récepteur n'est
déclenchée puis arrêtée que sur réception
de bits de début et de fin. On les appelle bits de start et de
stop. Ce mode, bien que moins performant, est le plus utilisé
actuellement dans les communications à travers le réseau
public.
4.3 Le support de transmission ou ligne
Un modem est utilisable principalement sur deux types de supports~: le
réseau commuté ou la ligne
spécialisée. Sur chaque type de support, les liaisons
peuvent être à deux ou quatre fils.
Dans le cas qui nous intéresse, le modem est relié au
réseau téléphonique commuté et la liaison est
à deux fils. Nous l'utilisons soit en half duplex, soit en full
duplex selon l'avis (voir définition de ce mot au paragraphe
Vocabulaire
.
A ce propos, réfléchissons un peu sur l'utilisation qui est
faite actuellement du Réseau Téléphonique
Commuté (appelé aussi RTC). Nous l'utilisons bien souvent en
full duplex sur liaison deux fils (avis V.32 ou V.34). Lorsqu'on utilise
des lignes à quatre fils, il est facile d'imaginer que l'on consacre
deux fils à chaque sens de transmission. Pour chaque sens,
considérant les vitesses de modulations maximales possibles, on
conçoit qu'il faut combiner plusieurs types de modulations pour
obtenir des débits maintenant courants de l'ordre de 28800 bits/s.
Or le RTC n'utilise que deux fils. Pour travailler en full-duplex
à des débits relativement faibles (en fait jusqu'à
l'avis V22 bis), il était possible de partager la bande de
fréquence en deux moitiés, une pour chaque sens. Avec les
débits employés actuellement ce n'est plus possible. Pour
travailler en full-duplex à d'importants débits, il est fait
appel à des algorithmes complexes dits "de suppression
d'écho" (proche et lointain). Imaginez le travail à
réaliser~: chaque modem reçoit les données
envoyées par le distant mélangées à ses propres
données. Le tout est encore pollué par de
l'écho~! Et pour compliquer le tout, tout ceci varie dans le
temps, et bien sûr d'une communication à l'autre.
Vous comprendrez donc qu'avec une telle utilisation du RTC, les modems
soient continuellement soumis à rude épreuve pour ce qui est
de la correction, ceci pouvant conduire à des débits
variables selon le moment.
4.4 L'adaptation du signal
Nous avons vu aux sections précédentes ce qu'étaient
une modulation et un débit. Rassemblons maintenant un peu toutes ces
idées. Bien souvent, c'est sur ce point délicat que les
esprits se perdent. Nous avons vu que la rapidité de modulation est
une caractéristique essentielle de la bande passante. Plus cette
rapidité est grande, plus la bande passante demandée est
large. Sur le réseau téléphonique, la bande maximale
officielle est de 3100 hertz (300 à 3400 Hz). Dans les centraux
téléphoniques modernes, elle va jusqu'à 3500 Hz.
Pour bien comprendre le mécanisme de l'adaptation du signal,
imaginez maintenant que nous disposions d'un appareil électrique
capable d'émettre quatre niveaux de tensions possibles.
Les données à transmettre sont quant à elles toujours
présentées sous forme d'un flot ininterrompu (ou presque)
d'informations binaires.
L'idée serait de regrouper les bits deux par deux et de les faire
passer par ce dispositif, afin d'obtenir en sortie le niveau de tension
correspondant. Un tel signal en sortie est dit de valence 4. Plus
généralement, la valence d'un signal est le nombre
d'états qu'il peut prendre. Cette transformation du signal est
appelée codage.
Afin d'adapter ce signal de sortie au support, il faut maintenant le
moduler, par exemple en choisissant d'effectuer une modulation de phase.
Etant donnée sa valence, nous avons besoin de quatre
décalages de phase.
A chaque fois que deux bits se présentent, il est possible
d'effectuer une modulation. A l'autre bout, l'équipement est
capable de regénérer deux bits. Le débit (en
bits/s) est donc bien double de la vitesse de modulation
(exprimée en bauds).
Exemple
Vous configurez un modem à 4800 bits par seconde (V.27~ter).
Que va-t-il se passer ~? Selon cette norme, le modem va
réaliser une modulation de phase différentielle octovalente.
Il va donc regrouper les bits par trois (tribits) pour moduler le
signal. La vitesse de modulation est donc de 1600 bauds et le débit
de 4800 bits/seconde. Pour obtenir un débit de 9600 bits par
seconde, il faudra combiner un autre type de modulation. La section
Débits et modulations
présente
l'essentiel des modulations utilisées dans les différentes
normes actuelles.
Résumé
L'adaptation du signal peut se faire de trois manières~:
-
par une simple modulation appropriée~;
-
par un codage puis une modulation~;
-
par un simple codage. Ce type d'adaptation est présent dans certains
modems dits "bande de base" qui transmettent directement ce code sur
la ligne. Ce ne sont pas ceux que nous utilisons couramment.
La rapidité de modulation s'exprime en bauds. Elle correspond
au nombre de changements d'états du signal par seconde sur la ligne
de transmission. Une rapidité de b bauds ne correspond pas
forcément à b bits/s sur la ligne. Une configuration
binaire (un ou plusieurs bits selon la valence) correspond à un
état du signal.
4.5 Le dialogue
Intéressons-nous maintenant au dialogue entre l'équipement
informatique et la jonction.
La jonction série
La jonction spécifie les caractéristiques mécaniques,
électriques et fonctionnelles des signaux. Bien entendu ces
jonctions sont normalisées (voir plus loin les tableaux
récapitulatifs sur l'état actuel de la normalisation) et
celle qui nous intéresse plus particulièrement est
référencée sous le nom V.24 par l'U.I.T, sensiblement
équivalente de la norme RS-232C définie par
l'E.I.A
Electronic Industries Association.
.
Voici une description des signaux de l'interface V.24 les plus couramment
utilisés~:
Brochage des prises côté soudures :
La jonction sérieLe dialogue proprement dit
Prenons deux postes de travail équipés d'un modem chacun et
souhaitant communiquer.
Nous passerons rapidement sur le fait que les équipements doivent
être reliés à la masse. Ceci est réalisé
grâce au circuit 101. D'autre part, il est nécessaire de
définir une référence de signalisation~: c'est le
rôle du circuit 102.
Dès sa mise sous tension, l'ETTD présente un état
logique "1" sur le circuit 108~: Terminal de Données
Prêt (DTR). Dès la mise sous tension de l'ETCD, celui-ci
présente l'état Poste de Données Prêt (DSR)
correspondant à un état logique "1" sur le circuit 107,
assurant ainsi que le modem est sous tension et connecté à la
ligne.
L'ETTD ayant des données à émettre, demande à
émettre. Il présente sur la jonction l'information
Demande Pour Émettre (RTS) sur le circuit 105. Ceci valide le
modulateur de l'ETCD qui émet alors une porteuse.
Du coté appelé, l'ETCD détecte la présence de
la porteuse sur la ligne de transmission et le signale à l'ETTD sur
le circuit 109~: Détection de signal (porteuse). Les
circuits 107 et 108 auront été initialisés au
préalable comme ci-dessus.
L'ETTD ayant signalé son intention d'émettre sur le circuit
105 reçoit en réponse peu de temps après le signal
Prêt À Émettre (CTS) sur le circuit 106.
Les données peuvent ensuite circuler via les circuits 103 et 104.
Le contrôle de flux
Lorsqu'un émetteur émet de façon systématique
plus de données que le récepteur ne peut en accepter, il se
pose alors un problème qui ne peut être résolu que
grâce au mécanisme de contrôle de flux.
Le contrôle de flux peut être de différents types~:
- logiciel
Le modem insère des caractères de contrôles dans le
flot de données circulant entre l'ETCD et l'ETTD~: XOFF
pour arrêter l'envoi et XON pour le reprendre.
- matériel
Généralement appelé CRTSCTS, il met en oeuvre
l'emploi des circuits 105 (RTS) et 106 (CTS). Ce symbole est en fait le
nom donné à la constante du fichier d'inclusion
termios.h.
Le fonctionnement du contrôle de flux matériel pendant la
transmission peut se résumer ainsi~:
Avant d'émettre, le terminal doit lever son signal RTS (Request To
Send). À partir de ce moment, le modem, s'il est en mesure
d'émettre, lève le signal CTS (Clear To Send). Lorsque le
buffer du modem est plein, le modem descend CTS. Il le remonte
ensuite. Dans l'autre sens de transmission, lorsque le buffer du terminal
est plein, le terminal descend RTS.
4.6 La connexion au réseau téléphonique commuté
Maintenant, plusieurs questions se posent, et j'imagine que parmi celles
que vous vous posez il y a~:
-
et sous Linux, le fonctionnement est-il identique~?
-
à quel moment le numéro du correspondant a t-il
été composé~?
-
mon modem est configuré en réception/émission, comment
ça marche~?
- etc.
Nous allons maintenant tenter de répondre.
Eclaircissons un peu les choses. Le dialogue que nous venons de voir
concerne le dialogue théorique ETTD-ETCD et ETCD-ETTD sans se
soucier d'éventuelles contraintes pouvant provenir du système
d'exploitation. Il est toujours vrai. Néanmoins, il ne suffit pas
forcément pour qu'une communication soit établie, notamment
via le RTC. Nous allons étudier ce fonctionnement point par point
en prenant un bon système d'exploitation (Linux, mais ce n'est
qu'un exemple), un bon port série et du courage. Vous
continuez~?
Tout d'abord, nous avons vu qu'une communication commençait toujours
par le premier échange DTR/DSR, ou si vous préférez
108/107. La montée du circuit 108 est réalisée sous
Linux à l'ouverture du port série (ex.~ fopen
("/dev/ttyS0", ...) ). Cela se voit très bien sur un modem
externe, le voyant TR est allumé. La réponse du modem par le
circuit 107 est un peu différente. Dans la section
Le dialogue proprement dit
, pour des raisons de
simplicité, nous supposions que le modem répondait sur le
circuit 107 après un délai très bref,
c'est-à-dire qu'il était instantanément
connecté à la ligne.
Cette réponse est maintenant conditionnée par la connexion
à la ligne via le réseau téléphonique
commuté.
Initialisation du modem
En général, c'est juste après l'ouverture du port
série que le modem est initialisé. Cela se fait grâce
aux commandes AT que nous ne détaillerons pas. Simplement, ces
commandes sont envoyées au modem (par l'intermédiaire du
circuit 103) (ex.~ write sur le descripteur de fichier du
périphérique) et interprétées par lui,
lorsque~:
-
le circuit 108 est fermé (état "1")~;
-
le modem est en mode commande.
Établissement de la connexion
L'une des commandes d'initialisation permet la composition d'un
numéro. Le modem décroche (eh oui, ce terme barbare veut
dire que suite à la fermeture du relais, le central local envoie une
tonalité à la fréquence de 440 Hz~:-) )
puis compose le numéro.
Sur l'équipement distant, le circuit 108 est également
monté. Le modem appelé détecte l'appel. Le signal
d'indication d'appel (circuit 125) est utilisé en interne pour
mémoriser l'appel, le modem réalisant donc lui-même la
connexion à la ligne. Cette mémorisation est maintenue par
DTR (jusqu'à déconnexion).
À ce moment précis, le modem appelé répond en
validant son modulateur qui émet la porteuse.
Le modem appelant, en état de décrochage et attendant la
porteuse, met son émetteur en service. Après
négociation, le circuit 109 (DCD) est alors validé. Du
côté de l'appelé, le circuit 109 est également
validé. La prise de contact est terminée. Les circuits 107
(DSR) des deux modems sont alors montés en réponse à
DTR (asservissement des circuits 107-109).
Réponse automatique ou manuelle
Du côté de l'appelé, il est possible de mettre le modem
en mode réponse automatique. Il répond alors tout seul
à l'appel après quelques sonneries. Le registre S0 des modems
est généralement réservé à la
configuration de ce mode.
Lorsque ce registre contient la valeur 0, (ATS0=0), le modem est en
réponse manuelle. Sous Linux, c'est assez souvent l'option choisie,
et c'est le logiciel (notamment getty) qui gère l'appel. En
effet les gestionnaires, de tty tels que getty
préfèrent prendre en charge la connexion~: ce n'est pas
au modem à répondre à un appel mais à
getty lui même. Lorsque le modem reçoit un appel, il
émet simplement le message RING (bien sûr, si le mode
verbeux est bien configuré~: ATE1). Sur ce, getty envoie
la commande ATA qui valide le mode réponse et la porteuse.
Enfin, à la fermeture du port, les signaux 108/107 repassent
à l'état 0.
Voici à titre d'information l'organigramme d'un appel~:
Déconnexion
Plusieurs méthodes permettent de mettre fin à un appel~:
- Mode commande. Mettre le modem en mode commande et envoyer la
chaîne
+++ATH ~;
- Perte de porteuse. L'une des causes est la déconnexion
normale de l'autre modem~;
- Ouverture du circuit 108 (DTR). C'est la méthode la plus
couramment employée.
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[22 février 2002, JDNet]
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