INTERVIEWS 
 
Régis Medina
Consultant
Design-up
Régis Medina (Design-up)
"Les pratiques XP se renforcent entre elles"
Consultant et coach XP, Régis Medina nous décrit les nombreux avantages à intégrer cette méthode de développement dans ses projets, ainsi que les obstacles éventuels que l'on peut rencontrer.
01/03/2006
 
JDN Développeurs. Depuis quand pratiquez-vous l'Extreme Programming ?
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Regis Medina J'ai découvert l'Extreme Programming (nldr : XP) en 1998. J'ai rapidement commencé à expérimenter sur mes propres développements les pratiques techniques de cette démarche - les tests automatiques et le remaniement. Début 2001, j'ai participé à mon premier projet utilisant XP, cette fois-ci non plus en tant que développeur, mais comme coach (ndlr : l'un des rôles de la méthodologie XP).
J'avais connu des projets difficiles en début de carrière, et j'avais l'impression que quelque chose clochait dans la façon dont étaient organisées les équipes - chacun dans son coin, un code spaghetti difficile à maintenir, des tensions perceptibles dans la relation avec le client... Lorsque j'ai découvert XP, tout ce que je lisais me paraissait naturel.

Avez-vous pris en compte toutes les pratiques en bloc, ou avancé petit à petit ?
Je dirais... les deux ! J'avais un peu d'expérience du test et du remaniement avant le début du premier projet, mais lorsque celui-ci a démarré, nous avons tenté de mettre en place toutes les pratiques d'un bloc.
Tout n'était pas parfait dès le début. Il nous a fallu plusieurs mois - en fait plusieurs années - pour commencer à maîtriser le processus, pour que tout fonctionne de manière assez fluide, et aujourd'hui encore j'ai le sentiment d'avoir beaucoup à apprendre.

Aujourd'hui, utilisez-vous toutes les pratiques pour chaque projet, ou adaptez-vous votre usage de XP selon le projet ?
Toutes les pratiques d'XP se renforcent entre elles, donc il me paraît difficile d'en appliquer seulement certaines sans être rapidement limité.
Je suis donc partisan de mettre en place toutes les pratiques en bloc, sachant que certaines seront plus difficiles à intégrer selon le contexte spécifique du projet.

Avez-vous ressenti des difficultés à adopter ces pratiques - ou à les faire adopter ?
La mise en place d'XP n'a jamais été facile. En 2001, très peu de gens avaient entendu parler de cette démarche, et nous passions parfois pour des farfelus. Ensuite, il a fallu que nos managers justifient auprès de leur direction nos méthodes radicalement différentes du processus officiel de la société. Si nous n'avions pas fait nos preuves, on nous aurait très rapidement remis dans le rang.

XP n'est pas une méthode presse-bouton."
En interne, la mise en place des pratiques n'a pas non plus été toujours facile. Au début nous avions du mal à tout tester, les discussions des binômes étaient parfois un peu tendues, certaines itérations se terminaient un peu en catastrophe et prenaient un jour ou deux de retard.
Par ailleurs, certaines personnes de l'équipe ne se plaisaient pas dans cette organisation et compromettaient le bon fonctionnement de l'ensemble.

Je pense que ces difficultés existent encore aujourd'hui. XP n'est pas une méthode presse-bouton, ce n'est pas une petite astuce qui rend tout d'un coup les projets faciles.

Quelles ont été les évolutions les plus notables dans votre quotidien de développeur ?
Sans aucun doute le sentiment de faire partie d'une équipe soudée, le fait de savoir que l'on peut s'appuyer sur cette équipe, le fait d'apprendre en permanence. Le changement est vraiment radical comparé aux équipes cloisonnées que j'avais connues jusque-là.

L'autre grande amélioration, c'est la pratique des tests et de la conception incrémentale : travailler sur un code propre, passer son temps à ajouter des fonctionnalités et améliorer la conception plutôt que de corriger des bugs, savoir que l'on a quelques milliers de tests automatiques pour valider chacune de nos modifications.

Les anciennes méthodes de développement sont-elles encore valables ?
Je n'irai pas jusqu'à dire que toutes les équipes de développement doivent passer à XP. Les pratiques XP sont l'incarnation d'un certain nombre de valeurs, centrées en particulier sur l'ouverture, la transparence, la communication. Je connais des entreprises dans lesquelles ces valeurs ne sont clairement pas implantées, et dans lesquelles une transition vers XP risque fort d'avorter.

Plus généralement, je pense qu'il faut laisser aux équipes le choix de leur mode d'organisation, en fonction de leur propre contexte. Il y a donc une place pour différentes approches, sachant toutefois qu'elles n'offriront pas toutes les mêmes avantages, ou le même niveau de performance.

XP marche mieux avec de petites équipes soudées. Voyez-vous XP entrer dans le monde des grandes entreprises ?
XP peut fonctionner dans de grandes entreprises, pour peu que celles-ci laissent à leurs équipes un minimum de latitude sur leur mode d'organisation. Ensuite, concernant la manière de lier les équipes entre elles pour mener de grands projets, il existe des solutions agiles.

Avez-vous développé vos propres pratiques, en plus de celles prônées par XP ?
Je complète les pratiques XP par ma propre expérience, par exemple sur le plan de la conception du logiciel, ou encore sur les principes de conception de l'interface utilisateur. Il me semble que des guides plus spécifiques sont aujourd'hui nécessaires pour guider les équipes de développement sur ces axes, mais ce n'est en aucun cas spécifique à XP.
 
Propos recueillis par Xavier Borderie, JDN Développeurs

PARCOURS
 
 
Régis Medina, 34 ans, est un consultant indépendant spécialisé dans la mise en oeuvre de processus de développement agiles.

2006 Consultant auprès d'équipes de développement du domaine de la finance.
2005 Fondateur du projet Open Source UISpec4J, librairie de test automatique.
2001 Chef de projet XP dans le domaine des télécommunications.
2000 Création du site Design-up.com.

Et aussi co-auteur du livre "L'Extreme Programming" paru aux éditions Eyrolles.